A l’aube du XXIe siècle, l’Humanité traverse des mutations profondes, qui, pour certains savants et intellectuels, correspondent à des transformations de société, voir des changements de civilisation (Touraine, 1).
Ainsi, d’une part, l’Homme prend doucement conscience qu’il est responsable de perturbations environnementales et climatiques importantes (disparitions croissantes d’espèces vivantes, augmentations d’émissions de CO2 et des températures, fontes des glaces polaires, etc.), qui ont des impacts majeurs sur la dynamique de la planète Terre et de la Nature. Nous sommes ainsi entrés dans l’ère de l’anthropocène, où l’Homme est devenu le principal facteur de changements écologiques (Lorius & Carpentier, 2).
D’autre part, soutenu par les révolutions industrielles successives depuis deux siècles, l’Homme a pu se doter d’outils, de technologies et de robotisations, qui lui permettent aujourd’hui une emprise totale et majeure sur son mode de vie et ses environnements physiques et sociaux (outils de communication, assistances techniques, intelligence artificielle et robotisations, etc.). Ces transformations et évolutions connaissent une accélération et un niveau de pénétration dans nos vies quotidiennes si importants que certains évoquent une troisième révolution industrielle, voir une mutation profonde de nos sociétés et de nos rapports aux autres (Giorgini, 3).
Ces leviers, écologiques et technologiques, contiennent en eux des effets politiques, économiques et sociaux majeurs et sans aucuns précédents dans l’histoire de l’Humanité (Harari, 4), tenant tant de l’espoir à des vies meilleures (allongement de l’espérance de vie, domotique au service des personnes dépendantes, démocratisation de nouvelles nations…) qu’à de nouvelles formes de dystopies (flux migratoires croissants, actes de radicalisations et de xénophobies décomplexés, déstructuration des schèmes familiaux, augmentation des formes de précarité et de la pauvreté dans les pays développés…).
Chacun, homme ou femme, quelque soit sa situation personnelle, professionnelle, familiale et sociale, se trouve donc ainsi aujourd’hui confronté à d’importants changements : instabilité dans l’emploi, problèmes de couple ou de parentalité, exclusion sociale économique et technologique, isolement, migration, épidémies… Face à cela, chacun se trouve nécessairement préoccupé et inquiet pour son avenir et celui de ses proches. Et, si la peur, la colère ou l’inquiétude ont à s’exprimer, elles ne peuvent sans accompagnement que conduire aux risques de replis sur soi, de radicalisation des discours voir de haines des autres, de conflits et de marginalisations.
Pour autant, la multiplicité des enjeux et leur complexité ne doivent pas interdire de viser un idéal et un avenir heureux (Morin, 5). Ainsi, pour faire face aux transformations évoquées, pour ne pas les subir mais en jouir, il nous semble nécessaire d’accompagner chacun dans la révision de ses inquiétudes et dans le dessin de sa place dans cette société changeante. Cela appelle à, selon nous, s’interdire le rôle de l’expert, du spécialiste et du « sachant » au profit d’un dépassement des pratiques et usages, pour s’engager vers une maïeutique créatrice.
Ainsi, les acteurs de l’association GINKGO ne se veulent ni les promoteurs des évolutions et révolutions à venir, tels des transhumanistes, ni les accusateurs de leurs effets et conséquences tels des climato/techno-sceptiques. Ils font le pari que l’entre-deux, la voie utile et heureuse, ne se construira que sur la seule ressource efficace pour appréhender les bouleversements probables : l’humanité même (Touraine, 6). Le projet se donne donc pour objet d’accompagner chacun, en défendant un idéal de société bâti sur (i) la reconnaissance de l’individu comme acteur de sa vie en qualité de citoyen, et (ii) la promotion du vivre ensemble, des liens et des relations entre chacun, seules fondement de la qualité humaine.
- Touraine, A. (2013). La fin des sociétés. Édition du Seuil, Paris.
- Lorius, C. & Carpentier, L. (2010). Voyage dans l’Anthropocène. Cette nouvelle ère dont nous sommes les héros. Actes Sud, Arles.
- Giorgini, P. (2014). La transition fulgurante. Bayard Culture, Paris.
- Harari, Y.N. (2015). Sapiens. Une brève histoire de l’humanité. Éditions Albin Michel, Paris.
- Morin, E. (2012). La Voie. Pour l’avenir de l’humanité. Librairie Arthème Fayard, Paris.
- Touraine, A. (2015). Nous, sujets humains. Éditions du Seuil, Paris.